État des lieux de la scolarisation au Togo,

Bien que ce fut l’un des pays avec le taux de scolarisation le plus important d’Afrique francophone dans les années 1960, époque à laquelle l’enseignement primaire et secondaire était presque exclusivement assuré par l’État indépendant togolais, dès le début des années 1980, le Togo est le pays africain le plus touché par la déscolarisation. Le taux de scolarisation primaire est passé de 72,1 % en 1980/81 à 52,6 % en 1984/85 tout en étant accompagné d’un recul de l’égalité filles-garçons dans le milieu scolaire.

Suite à la crise du sytème scolaire des années 1980-1985, la part de l’enseignement public jusqu’alors très importante diminue fortement, tout d’abord au profit de l’enseignement privé laïc (autrefois quasiment inexistant), puis également au profit des écoles communautaires.

La fin des aides bilatérales et multilatérales, notamment dans le cadre de l’Assistance officielle au développement (APD), suite aux sanctions contre le régime politique en place dans le pays, le rôle des ONG internationales et de certains organismes onusiens comme l’UNICEF est devenu primordial en ce qui concerne l’aide aux populations, en particulier concernant le développement de l’offre éducative, la reconnaissance juridique par l’État des écoles communautaires ainsi que les programmes d’aide à la scolarisation des filles.

Ce phénomène s’amplifia au début des années 1990, années durant lesquelles une crise économique et politique secoua le pays.  

Le système scolaire togolais :

Le système scolaire togolais comporte quatre degrés d’enseignement calqués sur le système français :

  • l’enseignement du premier degré d’une durée de cinq ans assuré par l’école primaire
  • l’enseignement du deuxième degré assuré par le collège
  • l’enseignement du troisième degré à l’issue duquel les étudiants passent l’examen du Baccalauréat.
  • et enfin l’enseignement du quatrième degré, correspondant à l’enseignement supérieur et qui dure de trois à sept ans. Il est quasi exclusivement assuré par les deux uniques universités généralistes du pays situées à Lomé et à Kara. L’effectif global d’étudiants était estimé à près de 63 500 pour l’année académique 2011-2012.

Egalité Filles-Garçons dans l’accès à l’éducation :

Bien que l’égalité filles-garçons soit affirmée dès la réforme scolaire de 1975 : « Tout au long du cursus scolaire, l’école doit offrir des chances égales aux filles comme aux garçons » (Ministère de l’Éducation nationale, 1975), complétée par la suite avec la loi relative à « la protection des filles et des garçons régulièrement inscrits dans un établissement d’enseignement ou dans un centre de formation professionnelle » (loi n° 84-14 du 16 mai 1984) visant à mettre fin aux abus sexuels, et enfin dans les années 2000 par diverses lois destinées à lutter contre les discriminations sexuelles ou les violences faites aux filles et aux femmes, le Togo est aujourd’hui l’un des pays africains où les inégalités de réussite à l’école selon le sexe sont les plus fortes.

Ceci se reflète à travers les taux de redoublement et d’abandon, de réussite aux examens, ou encore de passage d’un degré à l’autre, bien plus faible chez les filles ainsi qu’à travers l’absence de politiques en faveur de l’emploi avec par exemple un recul important et récent de la parité enseignantes/enseignants et des taux de chômage comparativement plus élevés que ceux de leurs pairs.

Démographie, économie et dépenses publiques en matière d’éducation :

Entre 1981 et 2010, la population togolaise a presque doublé avec un taux de croissance démographique relativement élevé de 2,84%, ce qui correspond selon les estimations à une augmentation estimée de 44% entre 2010 et 2025 de l’ensemble de la population scolarisable, avec tout ce que cela implique en matière de volume des dépenses publiques en éducation (transferts, construction de nouvelles salles de classes, recrutement de nouveaux enseignants, achat de matériels didactiques, etc.).

Malgré la croissance économique, les performance macroéconomique du pays demeurent encore faible, surtout au regard de la demande sociale liée à la forte pression démographique observée. Le niveau de pauvreté demeure ainsi assez élevé : 58,7% en 2011 et le taux d’extrême pauvreté serait même en hausse : 28,6% en 2006 contre 30,4% en 2013 . Selon l’indice de développement humain, le Togo occuperait ainsi le 159ème rang sur 187.

La croissance économique des dernières années, la reprise progressive de la coopération internationale et l’élaboration de meilleures stratégies de recouvrement des impôts et des taxes par le gouvernement togolais ont permis un accroissement des ressources publiques totales et donc également des dépenses publiques consacrées au secteur de l’éducation, celles-ci passant entre 2000 et 2011, de 50,9 à 72,9 milliards de francs CFA, soit 27,6% des dépenses courantes de en 2011, valeur supérieure  de 5,5 points à la moyenne africaine.

Les dépenses des ménages pour l’éducation continuent néanmoins à occuper une place majeure dans le financement des dépenses nationales d’éducation avec un poids des dépenses des ménages de 63% au Togo contre seulement 30% pour des pays comparables.

Sur le plan de l’allocation intra-sectorielle des ressources, le primaire, avec 48,0% en 2011, bénéficie de la plus grande part des dépenses courantes d’éducation, tandis que d’autres branches tels que les efforts d’alphabétisation, avec 1,4% seulement des dépenses courantes d’éducation ou bien le 1er cycle de l’enseignement secondaire général avec 15% apparait sous-financées.

Accès à l’école et discriminations :

On estime qu’actuellement dans le pays 7% enfants n’aurait pas accès à l’école et que près de 23% de ceux qui y ont accès abandonnent avant la fin du cycle primaire. Les phénomènes d’abandon et de redoublement aujourd’hui monnaie courante au Togo ont engendré un « gaspillage » de près de 44% des ressources allouées au primaire. Les populations particulièrement touchées sont les plus fragiles, les filles, les enfants des milieux ruraux, de certaines régions administratives comme les Savanes, et des familles pauvres.

Dans la région des savanes 17% des enfants n’accèdent pas à l’école et près de 46% n’achèvent pas le primaire, alors que cela ne concerne respectivement que 3% et 15% des enfants issus de la commune de Lomé.  Les enfants provenant du quintile le plus riche ont 13% plus de chances d’entrer au primaire, et 34% plus de chances de l’achever ; 2,7 fois plus de chance d’achever le 1er cycle du secondaire et jusqu’à 6,8 fois plus de chance d’achever le 2nd cycle. 

Niveau scolaire :

Le niveau d’acquisition des élèves togolais est globalement faible. En effet, au niveau du primaire, les élèves togolais en fin de CM1 totalisent aux tests PASEC un score de 30,6 sur 100 en français et de 36,4 sur 100 en maths, bien en dessous de la moyenne des pays d’Afrique francophone. Après six années de scolarité, une bonne proportion d’adultes togolais (28%) ne saurait toujours pas lire. Le taux moyen d’analphabétisme chez les adultes de 15 à 44 ans est par ailleurs estimé à 43,3%. 

Débouchés:

L’insertion sur le marché du travail est plutôt difficile pour les sortants du système éducatif à cause d’une forte concentration des emplois dans le secteur informel et d’une étroitesse du secteur de l’emploi moderne qualifié, ne représentant que 11% seulement des emplois. Paradoxalement, le taux de chômage croît au fur et à mesure que l’on monte dans la pyramide éducative : environ 4% pour ceux qui n’ont jamais été à l’école; près de 7,1% pour les sortants du niveau primaire ; 8,5% pour les sortants de niveau collège ; 9,9% pour les sortants de niveau lycée ; 13,8% pour les diplômés de l’ETFP et 29,9% pour les diplômés du supérieur

Le personnel éducatif:

Alors que le niveau de rémunération moyens des enseignants fonctionnaires et auxiliaires est plus élevé que celui de la moyenne des pays comparables, les enseignants volontaires du primaire, apparus pour faire face à la demande scolaire et payés directement par les familles, ne sont comparativement que très peu rémunérés. Afin de pallier cette inégalité de traitement, une mesure récente datant d’août 2013 a permis l’intégration de 5000 enseignants volontaires dans le corps des auxiliaires. 

Des projets en cohérence avec les politiques publiques locales,

Tous nos projets sont réalisés dans un souci de cohérence et de coopération avec les acteurs des politiques publiques locales notamment en matière d’éducation.

Les objectifs du gouvernement togolais pour l’horizon 2025 : 

  • L’universalisation de la scolarisation primaire notamment à travers la suppression des frais de scolarité instaurée en 2008
  • La transformation des Ecoles d’Initiative Locales (EDIL) en écoles publiques
  • La suppression de la catégorie des enseignants volontaires recrutés et payés par les associations des parents d’élèves et la prise en charge de tous les enseignants par le budget de l’Etat
  • La réduction du nombre de redoublements au primaire, source importante de gaspillage de ressources, à travers un arrêté fixant les seuils de redoublement ainsi qu’à travers le développement de pratiques tels que le tutorat qui consiste à responsabiliser des élèves souvent plus forts pour aider les plus faibles et ce sans coût supplémentaire pour les structures. 
  • Une amélioration de la qualité des acquis scolaires ainsi que la dotation de chaque enfant et de chaque enseignant d’un manuel de lecture et de calcul édité au niveau national afin de pérenniser la disponibilité de ces outils pédagogiques essentiels à la qualité des apprentissages et d’homogénéiser les acquis des élèves à l’échelle du pays.
  • La mise en place progressive d’un enseignement fondamental de dix ans intégrant le cycle primaire et le premier cycle de l’enseignement, afin d’élever le taux de transition entre l’école primaire et le collège
  • Faire évoluer l’offre de formation, afin qu’elle prenne plus compte des besoins du marché du travail grâce à l’instauration d’un pilotage sectoriel Public/Privé
  • Une amélioration de la formation des enseignants, interrompue pendant la période de crise politique avec l’introduction d’une Formation Initiale de Rattrapage (FIR) des enseignants auxiliaires du préscolaire et du primaire, la réhabilitation et la construction des ENI (Ecole Nationale d’Instituteurs) ainsi que de formations continues. En outre des efforts de stabilisation des enseignants dans des zones difficiles seront entrepris.
  • La réhabilitation des équipements des établissements, la construction et l’équipement de nouvelles structures éducatives. En effet, les objectifs de Scolarisation Primaire Universelle 2020, prévoyant la construction de 1 000 salles de classes par an, n’ont pas atteint les résultats escomptés avec une chute de la proportion de salles de classe « en dur » de 70% à 63% dans l’ensemble des écoles primaires, entre 2006-2007 et 2011-2012. 60% de l’augmentation du nombre de salles de classe en 5 ans s’est faite au travers de salles de classe non durables. Le nouveau programme prévoit donc la construction de 510 salles de classes équipées de latrines par an ce qui devrait ramener à 80 % la proportion de salles de classes en dur à l’horizon 2025.
  • La mise en place d’un fonds d’appui pour mettre en œuvre une alphabétisation fonctionnelle et orientée vers les activités génératrices de revenus. L’objectif visé étant de réduire les taux d’analphabétisme à 16% à l’horizon 2025.
  • Développer un partenariat efficace avec les différents membres du corps social qui devront être davantage consultés et associés aux décisions majeures du secteur de l’éducation.
  • Améliorer la gestion des ressources (humaines, matérielles et financières) allouées au secteur éducatif pour qu’elles soient utilisées de façon rationnelle, efficace et transparente à travers une optimisation de la dépense, la création d’un système d’information fiable, une déconcentration accrue, la responsabilisation et l’équipement des différents niveaux hiérarchiques, ainsi que le partage d’une culture de la transparence fondée sur le principe de la recevabilité.
  • Promouvoir une politique d’équité-genre du système éducatif reposant sur la mise en place de système d’appui destiné aux filles des zones défavorisées (bourses, kits, uniformes…). Un fonds pourrait être constitué en ce sens, alimenté par l’état et les partenaires (ONG, entreprises…).
  • Améliorer le système de l’alimentation scolaire, important levier de stimulation de la demande scolaire pour promouvoir le maintien des enfants à l’école, en particulier les jeunes filles et les enfants vulnérables, permettant à chaque élève togolais d’accéder à une alimentation suffisante et nutritive, lui garantissant à la fois la couverture de ses besoins énergétiques et de ses préférences alimentaires afin de mener une vie scolaire saine et active. Ce qui serait aujourd’hui le cas de seulement 3,2% d’enfants togolais.
  • Promouvoir la santé scolaire et universitaire en vue d’améliorer les capacités d’apprentissage et d’insertion sociale avec des campagnes de prévention du VIH-SIDA et des cours d’éducation pour la Santé 
  • Lutter pour l’inclusion des « besoins éducatifs spéciaux » et des handicaps par le biais de subventions aux écoles spécialisées et la formation des enseignants à la détection et la gestion des handicaps légers. 
  • Garantir le droit d’organisations privées, collectivités locales et des confessions religieuses de créer des structures de formation, permettant ainsi de concentrer le financement public sur la scolarisation des plus précaires, tout en inscrivant ces initiatives privées dans le cadre d’une stratégie globale pilotée et organisée par l’Etat.
  • Diminuer la distance avec le domicile familial. En effet, plus la distance est grande, plus elle implique des coûts pour les familles, freinant de fait l’accès à l’école. Aussi près de 41% des enfants qui ne vont pas à l’école sont à plus de 30 minutes de l’école primaire la plus proche. D’autres facteurs comme les modes d’organisation et les horaires scolaires devraient également être pris en compte afin de mieux correspondre aux demandes familiales ou les besoins spécifiques de certains enfants. 
  • La prise en compte des langues maternelles dans le processus d’alphabétisation et le développement d’un environnement lettré favorable à l’utilisation des écrits dans ces langues.
  • Étendre l’accès aux technologies de l’information et de la communication dans le système de formation et créer des offres de formations à distance moins coûteuses donc accessible au plus grand nombre.
  • Améliorer l’accès au matières scientifiques aujourd’hui très restreint avec à peine 10 % des étudiants post-bacs inscrits dans une formation scientifique et technologique en augmentant et en améliorant l’offre aujourd’hui insuffisante à cause du manque d’infrastructures et professeurs formés à leur enseignement.

Illustration de cette collaboration : l’école d’Ativémé

Nos projets s’inscrivent dans la logique des engagements du Ministère des enseignements primaires et secondaires togolais pour les écoles d’initivatives locales (EDIL).

Toutes les salles de classes construites sont par conséquent reconnues par l’Etat ce qui assure leur pérennité et leur appropriation au niveau local.

La cohérence et la pertinence des projets de Déka Éwé sont garanties par les contacts réguliers que nous entretenons avec les représentants locaux du Ministère comme les inspecteurs. En effet, nous ne pouvons prétendre agir sans une étroite coopération avec les autorités locales.

Ainsi, l’Inspecteur des Enseignements primaires et secondaires de la sous-préfecture du Zio travaille à Tsévié, à une vingtaine de kilomètres du village. Il était notre interlocuteur privilégié pour toutes les actions d’éducation que nous avons entreprises à Ativémé. 

C’est lui-même qui a, dans un premier temps, suivi et délivré par une lettre officielle, l’accord de l’État togolais pour le projet de construction des bâtiments scolaires. Nous l’avons d’ailleurs rencontré à chacun de nos séjours au Togo et les membres de NEJ se sont entretenus à de nombreuses reprises afin d’établir le calendrier d’exécution du projet.

Sources:

Ambassade de France au Togo. 2012. Fiche Togo. Ministère des affaires étrangères. https://www.diplomatie.gouv.fr/IMG/pdf/TOGO_Curie_14-02-12_cle8bdcf9.pdf

Equipe du plan sectoriel pour l’éducation. 2014. Plan sectoriel de l’éducation PSE 2014-2025; Amélioration de laccès, de l’équité et de la qualité de l’éducation au Togo. République Togolaise.

https://www.globalpartnership.org/sites/default/files/2015_02_togo_education_sector_plan_fr_1.pdf

Lange Marie-France, 2004. Inégalités de genre et éducation au Togo. EFA MONITORING REPORT UNESCO. https://www.genreenaction.net/IMG/pdf/Inegalites_de_genre_et_education_au_Togo.pdf